Microbes modifiés par génie génétique qui ne peuvent se propager en dehors du laboratoire
Les opposants au génie génétique ont de tout temps été préoccupés par les risques encourus par les organismes vivants modifiés (OGM) qui s’échapperaient dans l’environnement.
Une nouvelle stratégie de « confinement biologique » (1,2) peut remédier à ces craintes et ainsi ouvrir la voie à une utilisation plus importante d’OGM dans les domaines aussi variés que l’agriculture, la médecine ou même la dépollution de l’environnement.
Une des techniques utilise des bactéries dont la synthèse protéique a été modifiée de telle sorte qu’elle dépend d’un acide aminé (AA) qui n’existe pas dans la nature. Même après plus de 100 milliards de bactéries et durant 20 jours de culture pas un seul microbe (E. coli, fig.) n’a survécut en l’absence de l’AA artificiel. Ces bactéries ne peuvant échanger leur ADN -(conçu par génie génétique)- pourraient être un verrou supplémentaire dans la production en toute sécurité de composés thérapeutiques ou chimiques voire de combustibles, où elles sont tenues à l’écart de leur environnement. Ces bactéries modifiées pourraient également être relarguées sous contrôle dans le corps humain ou l’environnement.
Une autre technique originale utilise la synthèse protéique d’une souche d’E. coli dont le code (3).génétique a déjà été reprogrammé. Au lieu de reconnaître le codon stop ambre comme un ordre de mettre fin à la synthèse des protéines, la bactérie recodée le reconnaît comme devant intégrer un nouveau type d’acide aminé dans ses protéines.
Ces 2 techniques conduisent à des E.coli dépendant pour leur croissance d’un AA artificiel et comme il y a aussi inadéquation entre le code génétique du virus et celui de son hote (3), on conçoit que ces bactéries sont plus résistantes aux virus que leurs homologues naturels.
Une autre stratégie a consisté à développer un système de sauvegarde (4), dans lequel E. coli ne peut se développer que dans des environnements contenant des produits chimiques de synthèse nécessaires à leur expression génique. Une stratégie similaire a été appliquée à une levure (5) communément utilisée dans l’industrie et la biotechnologie ( S.cerevisiae, fig.) dont le matériel génétique chromosomique l‘apparente plus aux plantes qu’aux bactéries.
Reste la question de savoir comment on va évaluer l’absence de propagation dans l’environnement une fois qu’on aura répandu ces microbes «bioconfinés ».
1. Mandell, D. J. et al. Biocontainment of genetically modified organisms by synthetic protein design Nature, 518, 55-60, (2015).
2. Rovner, A. J. et al. Recoded organisms engineered to depend on synthetic amino acids Nature 518, 89-93 (2015).
3. Lajoie, M. J. et al. Genomically Recoded Organisms Expand Biological Functions. Science 342, 357-360 (2013).
4. Gallagher, RR et al. Multilayered genetic safeguards limit growth of microorganisms to defined environments. Nucleic Acids Res., 43 (3): 1945-1954 (2015)
5. Cai, YZ et al. Intrinsic biocontainment: Multiplex genome safeguards combine transcriptional and recombinational control of essential yeast genes PNAS, 112, (6), 1803-1808 (2015)